Où le zéro-déchet rencontre la pleine conscience
par Jessica Bou Nassar Dialogue sciences et politiques
Lorsque nous voulons réduire nos déchets, on vise souvent les trois “R” : réduire, réutiliser et recycler. En suivant ces trois modes, on essaye de trouver des produits qui sont plus respectueux de l’environnement. Il y a aussi d’autres stratégies traditionnelles comme compenser pour notre empreinte carbone ou acheter des produits d’occasion.
En tant qu’êtres humains conscients de l’état de notre planète, nous devons essayer de faire le plus possible pour améliorer l’environnement. Je crois qu’il est également important d’être conscient des conséquences de nos actions. Par exemple, quels sont les impacts d’investir dans un système de compensation carbone qui vise à fournir des services de planification familiale aux femmes des pays du tiers-monde ? D’après moi, cela est un transfert du fardeau concernant la dégradation de l’environnement : d’un voyageur aérien privilégié à une femme d’un pays en développement dont l’empreinte carbone est modeste.
Quotidiennement, je tente de prendre du recul pour évaluer le cœur du problème environnemental auquel nous faisons face. En réfléchissant aux stratégies du mouvement zéro-déchet, je crois qu’il faudrait aussi prendre en compte un problème plus profond : notre besoin, en tant qu’êtres humains, de consommer. Parfois, je me pose des questions telles que : pourquoi avons-nous cette envie ? Comment pouvons-nous la contenir ? Si nous ne l’avions pas, la crise environnementale aurait-elle été aussi urgente ? Parfois, je suis presque certaine que les biens de consommation sont au centre du problème environnemental. Bien sûr, ce n’est rien d’autre que mon opinion !
Actuellement, les développements économiques et technologiques ont entraîné une augmentation des tendances de consommation. Les entreprises maîtrisent l’art d’étudier nos processus psychologiques pour maximiser leurs profits. Personnellement, je m’attends à ce que la situation s’aggrave. L’intelligence artificielle aide à persuader le client comme jamais auparavant. À mesure que nous continuons à alimenter l’algorithme de données, les prédictions par rapport aux décisions du client sont meilleures et nous poussent à faire plus d’achats qui sont, la plupart du temps, impulsifs. Une grande partie de ces achats sont aussi des “produits verts” ! Le seul problème, c’est qu’il s’agit de produits verts dont vous n’avez jamais vraiment eu besoin, mais que vous avez plutôt été persuadé d’acheter pour rentrer dans le cadre de la mode zéro-déchet. Après tout, est-ce vraiment éco-responsable d’acheter un produit vert pour remplacer un produit parfaitement réutilisable que vous possédez déjà ?
Parfois, je me pose aussi cette question : À une époque où le capitalisme de surveillance et l’intelligence artificielle créent une superpuissance au service du marché, comment pouvons-nous éviter la tentation et combattre l’envie de consommer ?
Au cours d’une conférence TED, l’un de mes auteurs préférés, Yuval Harari, a rendu évident l’importance des activités spirituelles (comme la méditation) ainsi que la connaissance de soi afin de résister à la force persuasive de l’algorithme. De plus, certaines écoles de pensée ont établi une corrélation entre une consommation durable et la pleine conscience, l’autoréflexion, ainsi que le mouvement ‘’doux’’ .
À mon avis, nous devrions s’efforcer de combiner les approches traditionnelles avec des approches moins conventionnelles pour atteindre un mode de vie durable. C’est pourquoi j’entreprends l’intégration de trois nouvelles habitudes dans mon quotidien.
1. Routines du mouvement ‘’doux’’
Le mouvement ‘’doux’’ a commencé en Italie lors des protestations contre l’ouverture du premier McDonald à Rome. Le mouvement a d’abord préconisé la cuisine à la maison, l’alimentation en fonction des saisons et les produits cultivés localement. Aujourd’hui, ce dernier couvre de nombreux aspects de la vie, tels que le travail, la mode et les relations. Il prône principalement un changement de culture, pour ralentir le rythme de vie.
En ce qui me concerne, j’ai constaté que prendre mon temps le matin, par exemple, m’aide à me préparer à une journée de travail sans déchets : de prendre mon café à préparer des repas, je peux m’assurer que je n’aurai rien à acheter tout au long de la journée. Cela a justement été le principal changement dans ma routine quotidienne qui a eu un impact sur ma consommation.
J’ai également constaté que lire à propos de ce mouvement a eu des répercussions positives sur ma façon de cuisiner, de manger et d’acheter de la nourriture. Je gère mes repas de manière beaucoup plus durable et surtout, sans effort !
2. Pratiques d’auto-réflexion
Qu’il s’agisse de rédiger un journal ou prendre quelques moments pour soi, l’auto-réflexion est, selon moi, importante pour évaluer notre dévouement au mode de vie zéro-déchet. Cet été, j’avais l’habitude d’écrire dans un journal tous les matins afin de suivre mes habitudes de consommation.
Dernièrement, plutôt que d’écrire dans mon journal, je consacre au minimum dix minutes de ma soirée à l’auto-réflexion. Ainsi, au lieu de faire des listes, je consacre mon énergie à lier mes habitudes de consommation à ma part de responsabilité climatique. Cela me donne un but, alimente ma motivation et me rappelle pourquoi j’ai commencé le mode de vie zéro-déchet. Une méthode que j’aimerais intégrer à ma routine est la réflexion sur les biens personnels. Si vous l’avez déjà essayé, n’hésitez pas à partager votre expérience dans la section des commentaires !
3. Méditation
Atteindre un état de conscience par la méditation pourrait nous aider à définir nos processus cognitivo-comportementaux qui conduisent à une consommation impulsive ou inconsciente. Quand je fais de la méditation, cela me donne le pouvoir de distinguer ce que j’ai besoin d’acheter de ce que je crois avoir besoin d’acheter après avoir été influencée par des publicités. Depuis que je fais cet exercice, j’ai réduit considérablement ma consommation, notamment en ce qui concerne la mode et les produits électroniques.
Il existe plusieurs façons de méditer. Par exemple, certains utilisent des applications de méditation ou partent en escapades. De mon côté, je préfère être entourée par la nature que par des objets électroniques. Je n’ai jamais eu l’occasion de faire une retraite de méditation, mais cela fait certainement partie de ma bucketlist ! Bien sûr, je ferai une escapade éco-responsable et éthique afin d’éviter un piège spirituel qui mène à la consommation et qui peut avoir des impacts négatifs sur différentes cultures.
Je crois que ces habitudes m’aideront à maintenir un mode de vie zéro-déchet qui correspond à mes valeurs personnelles dans un monde où l’intelligence artificielle sera des nôtres. J’espère qu’elles pourront aussi vous aider !