Briser le tabou: Promouvoir l’équité menstruelle pour une société plus inclusive

Science & Policy Exchange
5 min readMay 2, 2024

Par Maïa Dakessian, Dialogue sciences et politiques

Les produits menstruels sont un besoin fondamental. Malheureusement, plus de 500 millions de personnes dans le monde n’ont pas accès à des produits menstruels.

Qu’il s’agisse de cacher un tampon dans sa manche en allant aux toilettes ou de glisser rapidement une serviette hygiénique dans son sac à dos lorsqu’une amie vous en prête une (si vous avez le courage de demander !), le tabou qui entoure les menstruations fait qu’il est difficile d’en parler ouvertement sans se sentir honteuse ou embarrassée.

Dans de nombreuses cultures et familles, menstruer est considéré comme un sujet tabou. Pour lutter contre la stigmatisation des règles, il faut remettre en question les stéréotypes et les croyances négatives, comme l’idée que les personnes qui ont leurs règles sont «impures» ou «émotionnellement instables» pendant leurs menstruations.

Les tabous envers les menstruations sont des obstacles additionnels à l’accès à des produits menstruels ou à l’éducation en matière de santé et de droits sexuels et reproductifs. La pauvreté menstruelle est le manque d’accès aux produits menstruels, à l’éducation, aux installations d’hygiène, à la gestion des déchets, ou à une combinaison de ces éléments. Il s’agit d’un problème mondial de santé publique qui a un impact disproportionné sur la santé physique et mentale des jeunes, des mères célibataires, des personnes sans-abri, des personnes immigrantes, des personnes handicapées et des personnes vivant dans des régions isolées. La pauvreté mesntruelle a également un impact disproportionné sur les personnes autochtones, noires et de couleur (PANDC), ainsi que sur les personnes de la communauté LGBTQ2SIA+.

Les tabous envers les menstruations sont des obstacles additionnels à l’accès à des produits menstruels ou à l’éducation en matière de santé et de droits sexuels et reproductifs.

Par exemple, les jeunes menstruées en situation de pauvreté menstruelle sont plus susceptibles de manquer l’école parce qu’elles n’ont pas accès à une protection menstruelle adéquate. Par conséquent, les personnes concernées sont confrontées à des obstacles plus importants pour bénéficier d’une éducation de qualité et éventuellement d’un emploi, perpétuant ainsi le cycle de la pauvreté.

Source de la figure: Figure preparé par la Bibliothèque du Parlement avec des données obtenues auprès de Always et de Plan International Canada, Let’s Talk Periods! Menstrual Health and Hygiene in Canada, 2020; Environics Research, Attitudes and Awareness of Menstrual Equity and Period Poverty Among Canadians, Executive Summary, prepared for Women and Gender Equality Canada, 31 March 2023; and Leger and Plan International Canada, The Hidden Cost of Periods: A Canadian Perspective, 19 May 2023.

Les initiatives en faveur de l’équité menstruelle visent à résoudre les problèmes liés à la pauvreté menstruelle en augmentant l’accès aux produits menstruels, en améliorant l’éducation sur la menstruation et en brisant les stigmates sociétaux qui entourent les règles. Les initiatives visant à améliorer l’accès aux produits menstruels impliquent souvent la distribution de produits menstruels gratuits ou subventionnés dans les écoles, sur les lieux de travail et dans les centres communautaires. En ce qui concerne les initiatives visant à améliorer l’éducation sur la menstruation, de nombreuses plateformes en ligne, telles que Tes Règles de la Société des obstétriciens et gynécologues du Canada, offrent des ressources pour nous aider à nous éduquer et à éduquer les autres sur la santé menstruelle et à avoir des conversations ouvertes pour déstigmatiser les règles. Dans les systèmes scolaires, les programmes d’éducation sexuelle peuvent varier considérablement d’un système à l’autre en raison de la stigmatisation des menstruations. Les ressources externes jouent donc un rôle essentiel en complétant les cours académiques afin d’offrir une éducation impartiale de la santé reproductive.

Simultanément, les initiatives en faveur de l’équité menstruelle préconisent des changements de politiques de santé pour supprimer les taxes sur les produits menstruels. En 2014, la population canadienne a dépensé collectivement 519 976 963 $ en produits menstruels. Avec une taxe fédérale de 5 % sur ces articles essentiels, le gouvernement a perçu plus de 36 millions de dollars en revenus fiscales au cours de l’année. Heureusement, grâce au projet de loi C-282 présenté à la Chambre des communes en 2013 et à la campagne No Tax on Tampons, les produits d’hygiène féminine ont été ajoutés à la liste des articles exemptés de taxe du gouvernement fédéral canadien en 2015. L’abolition de cette taxe fédérale, que certains considèrent comme une taxe sexiste, est essentielle pour promouvoir la justice menstruelle et l’équité de genre. Avec le lancement du programme #EndPeriodPoverty en 2018, le Canada continue de s’attaquer activement à l’équité menstruelle, en réduisant le fardeau financier des produits menstruels. Au niveau provincial, la Colombie-Britannique, le Manitoba, Terre-Neuve-et-Labrador, la Nouvelle-Écosse et l’Ontario se sont engagés à fournir gratuitement des produits menstruels dans les écoles et le Nouveau-Brunswick offre des produits menstruels dans les bibliothèques publiques.

Dans l’actualité récente, Femmes et Égalité des genres Canada a lancé le projet pilote #MenstrualEquityFund en collaboration avec Banques alimentaires Canada pour aborder la question de l’équité menstruelle et lutter contre la pauvreté liée aux règles. Le gouvernement du Canada s’est associé à ce réseau national de banques alimentaires pour que, à chaque mois, 570 000 personnes ou familles à faible revenu n’aient pas à choisir entre l’achat de produits menstruels ou l’achat de nourriture. En fait, une enquête menée en 2023 par Plan International Canada en partenariat avec Leger a révélé qu’une Canadienne sur quatre ayant ses règles et âgée de plus de 18 ans devait choisir entre l’achat de produits menstruels et se nourrir ou payer son loyer.

Dans le cadre du projet pilote #MenstrualEquityFund, des efforts visant à accroître l’accessibilité aux produits menstruels ont été déployés. Depuis novembre 2021, une initiative de Services aux Autochtones Canada vise à fournir des produits menstruels dans les écoles des Premières Nations dans les réserves et dans les écoles fédérales à travers le Canada. En outre, Emploi et Développement social Canada fournit gratuitement des produits menstruels dans les lieux de travail sous réglementation fédérale depuis décembre 2023.

Le manque d’accès aux produits menstruels, aggravé par la stigmatisation sociale, perpétue la pauvreté menstruelle, affectant de manière disproportionnée les communautés marginalisées.

Le discours entourant menstruer doit évoluer pour reconnaître qu’il s’agit d’une fonction biologique fondamentale plutôt que d’un tabou. Le manque d’accès aux produits menstruels, aggravé par la stigmatisation sociale, perpétue la pauvreté menstruelle, affectant de manière disproportionnée les communautés marginalisées. En priorisant l’équité menstruelle, nous pouvons créer une société plus inclusive et plus solidaire, où chaque personne dispose des ressources nécessaires pour gérer leurs règles avec dignité et sans obstacles.

Mettons fin à la stigmatisation des règles ! Il y a plusieurs façons de soutenir la cause. Envisagez de faire un don ou du bénévolat auprès d’organisations qui se consacrent à la promotion de l’équité menstruelle au Canada. Par exemple, The Period Purse, basé à Toronto, se concentre sur l’éducation et la défense des droits pour lutter contre la stigmatisation. De plus, Bleed the North, un organisme sans but lucratif enregistré au fédéral, travaille activement à mettre fin à la pauvreté et à la stigmatisation liées aux menstruations, tout en plaidant en faveur d’une législation sur les menstruations dans la politique canadienne. En prenant ces mesures, nous pouvons contribuer à créer une société plus équitable et sans stigmatisation autour des menstruations.

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A student-run non-profit that works to foster the student voice in science policy and evidence-informed policy-making in Canada. Based in Montreal.