Offrir la possibilité de donner

Science & Policy Exchange
4 min readMar 25, 2021

Soupe et Cie, un restaurant de Limoilou, dispose depuis 2017 d’un frigo communautaire à destination de toute personne dans le besoin, une aide d’autant plus essentielle durant la pandémie de COVID-19.

Par Melina Papalampropoulou-Tsiridou, Dialogue Sciences et Politiques

En descendant la magnifique 3e avenue de Limoilou, un des quartiers les plus pittoresques de la ville de Québec, vous ne pouvez manquer de remarquer le réfrigérateur rose foncé qui trône fièrement à côté du restaurant Soupe et Cie. C’est un réfrigérateur public dans lequel ceux qui le peuvent déposent de la nourriture, et ceux qui en ont besoin ont la possibilité de venir se servir.

Photo fournie par Soupe et Cie

Inspirée par l’article d’Emma Anderson sur Feed the Hen/Nourrir Henri Project à Montréal, j’ai décidé d’entrer en contact avec le restaurant afin de leur poser quelques questions sur leur fabuleuse initiative. En y répondant, Audréane, au nom de Soupe et Cie, nous apporte de précieuses informations sur ce projet et nous permet de nous représenter la valeur de ce frigo.

Le projet Frigo Partage (Shared Fridge en anglais) a été mis en place en 2017, en réponse à deux constats frappants. Le premier est l’incommensurable gaspillage de nourriture observé dans les restaurants; une triste réalité qui concerne la plupart des acteurs de ce secteur, mais qui se retrouve également chez les particuliers. En effet, près de 168 tonnes de nourriture sont gaspillées chaque année en Amérique du Nord, il est donc grand temps de réagir. Le second constat est que le nombre de personnes sans abri ou qui ne peuvent subvenir aux besoins de leur famille augmente de façon alarmante, et la pandémie de COVID-19 ne fait qu’aggraver cette situation.

Quand il a débuté, le projet a très bien été accueilli par la communauté. Le restaurant souhaitait « offrir aux habitants de Limoilou la possibilité de donner » et le concept a vite fonctionné. Bien qu’il soit difficile d’obtenir les nombres exacts, chaque jour entre deux et cinq personnes y déposent des plats cuisinés ou des aliments en conserve. Quand Soupe et Cie a ouvert, le restaurant utilisait le frigo pour redistribuer les plats non consommés, puis les restaurants voisins pouvaient en faire de même. Il est compliqué de déterminer combien de personnes ont pu bénéficier du frigo, mais le « partage est réel ».

La communauté de Limoilou est une source de soutien continu à cette initiative, et Soupe et Cie ne manque pas de parler du projet sur les réseaux sociaux tout en se chargeant de l’entretien et du nettoyage du réfrigérateur. En tant que projet communautaire, sa réussite dépend de l’implication des habitants et il est de la responsabilité de la communauté de s’assurer que le frigo soit toujours plein. Une initiative à relever : un groupe qui se fait appeler les Fées du frigo se charge de le remplir régulièrement, ainsi que d’autres réfrigérateurs répartis dans les différents quartiers de Québec.

Un des grands défis auxquels Soupe et Cie a dû faire face en 2017 au début du projet a été de satisfaire aux exigences d’une inspection du Ministère de l’Agriculture, des Pêcheries et de l’Alimentation (MAPAQ). L’objectif étant d’assurer de la qualité de la nourriture partagée, bien que les personnes à l’origine d’un don sont responsables de la dater correctement. Du fait qu’il n’y a pas de réglementation en ce qui concerne les dons de nourriture, le rôle du ministère est d’accompagner ce type d’initiative afin d’assurer la sécurité alimentaire et de proposer des mesures d’hygiène, de manipulation des aliments et de pratiques de stockage adéquates. À titre d’exemple, le ministère recommande d’étiqueter les récipients avec les informations de base telles que le nom du produit et la date d’emballage ou de mise en portion. Soupe et Cie a obtenu le feu vert du ministère et peut continuer à mettre à disposition le frigo communautaire.

« Mettons fin au gaspillage: c’est fin pour ceux qui ont faim »
Photo fournie par Soupe et Cie: Crédit photo : Maggie Martel

C’est un soulagement et un réconfort de voir les communautés se rassembler et se soutenir dans toutes les provinces québécoises. De Rimouski à la région métropolitaine de Montréal, plusieurs frigos communautaires ont été mis en place afin d’aider les personnes dans le besoin. Cependant, les initiatives privées ne seront peut-être pas suffisantes pour combattre la faim et la misère. Nous avons besoin de programmes gouvernementaux organisés, structurés et subventionnés afin d’aider au mieux les personnes sans abri et confrontées à la pauvreté à se remettre sur pied, ainsi qu’à sortir de la stigmatisation et des idées reçues sur leur situation.

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A student-run non-profit that works to foster the student voice in science policy and evidence-informed policy-making in Canada. Based in Montreal.